Samedi dernier j’ai assité à la conférence de Paule Lebrun, créatrice de Ho rites de passage, donnée à l’occasion du Forum du Grett, dont le thème cette année était “Rituels et transformations”. J’ai été subjugée par le ton coloré – de son joli accent canadien –, enjoué et enthousiasmant de sa présentation. Chacun des mots prononcés a vibré et fait sens pour moi.
Paule Lebrun, journaliste de formation, a découvert les rites de passage au cours de ses nombreux voyages. Elle participe aujourd’hui à ce qu’elle appelle le “mouvement pour le réenchantement de la vie”. La définition que donne Paule du rite de passage est la suivante : “c’est la théâtralisation qui ne s’adresse qu'à un seul spectateur – l’inconscient – de l’acte de mourir et de renaître”.
“Nous avons à faire face à la mort avant de mourir”, dit-elle. C’est la fonction du cul-de-sac ! Quand on se retrouve dans l’impasse, quand c’est bouché devant, derrière, dessus, dessous, sur les côtés, où que l’on regarde… Eh bien, c’est une incroyable chance ! La chance inouïe de passer de l’autre côté, de mourir avant de mourir (”Die before you die”*). Autrement dit, le cul-de-sac est un portail qui donne accès à la révélation, à l’histoire élargie de notre vie. Pour formuler ceci simplement : “l’impasse est la sortie”.
Ce moment de bascule est appelé sacré ou magique : la magie, c’est l’âme qui agit (l’âme agit). Dans cette perspective, la vie n’est pas “un problème à résoudre mais un mystère à marcher” – s’ouvrir au mystère, c’est être capable de coucher les je sais et accéder à la relaxation profonde des je ne sais pas. Les amérindiens disent “marcher sa parole”. C’est aussi “marcher son mythe” ou marcher dans les pas des dieux et déesses, du héros ou de l’héroïne que nous sommes appelés à devenir.
On ne battit pas sa vie sur la sécurité, mais sur l’aventure. Malheureusement aujourd’hui nous sommes trop dans le logos (le langage rationnel) et pas assez dans le mythos (le langage symbolique). Nous avons perdu le sens du symbolique et nous ne fabriquons plus d’âme. L’âme s’acharne et dit : “I want more !”**, alors on lui répond : “performe… ou achète !”. Or, l’âme humaine se nourrit de beauté, de silence, de nature sauvage, de rythme, de rites…
Cette approche poétique correspond à une célébration – un rituel est toujours festif et sacré – dans le but de réenchanter la vie. C’est apprendre à danser dans la rue, sous la pluie, danser ses chutes, blocages, obstacles, culs-de-sac… Remythologiser sa vie, c’est accéder à son histoire élargie et à sa propre dimension héroïque.
C’est cette aventure que je vis et que j’accompagne. Pour participer au mouvement de réenchantement de la vie, mon job est de fabriquer du mythos dans une sociéte qui n’en a pas beaucoup – grâce aux quinze archétypes grecs que je souhaite développer, aussi bien pour les particuliers que les entreprises. Il est temps de fabriquer de l’âme jusque dans les entreprises et créer ce que j’appelle “l’entreprise sacrée”.
*Meurs avant de mourir. **Je veux plus !
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